dimanche 16 août 2020

Développer sa société : croissance ou rentabilité


L'un des décisions les plus structurantes à mon avis, qui concerne l'entrepreneur est de le choix qu'il doit faire de développer sa société en privilégiant la croissance ou bien la rentabilité.

Quand on parle de privilégier la croissance, on ne s'interdit bien sûr pas d'être rentable. Et à l'opposé, la rentabilité n'exclut pas la croissance mais il faut que le bilan reste bénéficiaire. 


Si le choix est fait de développer la croissance, alors il faudra dès le début penser financement, business angels, prêts bancaires, etc... 

Il faudra que le fondateur ne commette pas l'erreur de penser ses parts comme faisant partie intégrante de son patrimoine : psychologiquement, il faut qu'il se distancie de ses actions. Cela lui permet de prendre des risques qu'il ne pourrait pas prendre, s'agissant de son patrimoine en propre. 


Bien évidemment, le pari de la rentabilité est, à priori, plus adapté aux entreprises de services, tandis que celui de la croissance correspond mieux aux offres de produits innovants. 

Si votre objectif est la croissance, il faudra aller chercher rapidement du chiffre d'affaires, la perte devenant inévitable et devant être maitrisée autant que possible. Cette perte dépendra essentiellement de la rapidité avec laquelle vous voulez réaliser votre chiffre. 
 
Beaucoup de startups font ce choix, souvent avec succès d'ailleurs : elles se taillent une part respectable d'un marché puis elles se font racheter. C'est presque le schéma normal. 
On pense à Zoox créé en 2014 et rachetée dernièrement par Amazon pour 1,2 milliards de dollars. Ou bien à Youtube créé en 2005 et racheté l'année suivante par Google pour 1,65 milliards de dollars... 

Il y a énormément de startups qui se créent avec pratiquement l'intention initiale de se faire racheter par un géant de leur secteur. 

Il y a même des sociétés qui, devenus des mastodontes continuent de privilégier la croissance, comme si la rentabilité était un sujet vraiment très secondaire. On pense à Uber, Tesla, Lyft,...
Mais cela n'existe que depuis une dizaine d'années : jamais un Microsoft, un Cisco ou même un Google n'aurait eu l'opportunité de continuer à aligner les pertes année après année, sans conséquences sérieuses.



En fait, la croîssance dans l'état actuel du monde (infinité d'argent dans un monde fini) est aussi un pari sur le fait que l'appétit pour le risque va perdurer et que le système monétaire dans son état actuel tiendra.
Et c'est pour cela que cet article ne se contente pas d'émettre des banalités : quand vous faites le pari de la croissance aujourd'hui, vous faites aussi et surtout le pari que "la fête du slip monétaire" va continuer.  
A l'heure du Covid, si les entreprises étaient laissées à elles-mêmes (sans création monétaire des états et des banques centrales), la déflation qui s'ensuivrait serait terrifiante et la stratégie de la croissance devrait IMMEDIATEMENT être abandonnée.
Pour l'instant, en Août 2020, ce choix est payant. 

Bien sûr, tout le monde sait que ce système basé sur la création de plus en plus rapide de dettes, devra s'arrêter. Et que la transition sera délicate, pour dire le moins. Mais pour le moment, cela tient. 
Et si cela devait tenir encore 10 ans, vous avez le temps de créer, développer et revendre votre entreprise de croissance.

Des deux modèles, le plus "émotionnel" pour l'entrepreneur est celui qui privilégie la rentabilité, ou plutôt la croissance rentable. 
Dans ce mécanisme, on cherche à emprunter le moins possible. Il faut essayer de grossir en croissance organique, ce qui enlève le recours au capital risque et si possible, aux prêts bancaires. 

Vouloir conserver une croissance rentable rend votre entreprise beaucoup moins "sexy" aux yeux des employés potentiels. Elle vous handicape par ailleurs au moment de la valorisation, sauf si l'économie traverse une phase dépressive prolongée, ce qui n'est pas arrivé selon moi depuis 2001 et l'explosion de la bulle des dot-coms. 
 



Le choix de privilégier la croissance ou la rentabilité doit être clair dans la tête des dirigeants, avant même la création de l'entreprise. Il est fondamental pour la conduite des affaires. 

Pour ma part, j'ai choisi de privilégier l'approche rentabilité, car je n'arrive pas à m'émerveiller devant les perspectives induites par le tsunami monétaire qui s'abat devant nous comme l'explique si bien Bruno Bertez