vendredi 26 juillet 2013

La transition de la distribution cinématographique

La transition de la distribution cinématographique. 


Le secteur de la distribution cinématographique a entamé il y a quelques années un ensemble de transformations, portées par la numérisation presque totale de l'ensemble de la chaîne industrielle.
Cette numérisation est plutôt connue du grand public via les tournages en caméra numérique, qui introduisent de nouvelles technologies, telles que la 3D.
Elle se répand également dans les salles de projection qui sont en 2013 très majoritairement équipées de projecteurs numériques.
Du point de vue de la distribution, on observe la disparition de la bobine de 35 mm, et de tout un cortège de services associés (notamment le transport des bobines), au profit d'autres services, tels que la mise en conformité des fichiers d'images et de sons, avec le fameux standard DCP (Digital Cinema Package).
Des solutions de chiffrement s'appuyant sur des technologies éprouvées tels que les systèmes à base de clés publiques, sont élaborées. C'est le cas du système KDM ( Key Delivery Message).

L'industrie tout entière est donc en recomposition, et en premier lieu le secteur de la distribution cinématographique.

On observe que :
  • Le coût des films diminue en amont, du fait notamment de la disponibilité de caméras numériques performantes et bien moins chers. Bien sûr, pour des films à grand spectacle, ou faisant appel aux plus grandes stars, le coût de la pellicule était de toute façon négligeable. Mais sur des films à petits budgets, ce coût n'est pas négligeable.
  • La crise est également passée par là, et même sur les films faisant appel à un casting étoilé, les cachets des stars sont revus à la baisse. Il y a bien sûr des accidents industriels, comme John Carter (dûs aux effets spéciaux), mais globalement, le budget des films semble plus sous contrôle qu'il y a 10 ans, à l'exception notable des gros blockbusters de l'été, qui font souvent profusion de super-héros.

Il résulte des deux points énoncés ci-dessous une augmentation importante du nombre de films, je dirais même une avalanche de nouveaux films chaque semaine ! Les salles obscures n'arrivent plus à suivre. Compte tenu de la barrière à l'entrée, le rapport de forces s'établit désormais très nettement en faveur des exploitants.

Tout l'effort à faire pour faire le succès du film en salles, se reporte tout naturellement sur le marketing opéré par le distributeur, ce qui ne lui profite pas du tout. 
La profusion de films chaque semaine et la "concurrence" des nouveaux moyens de transmission de l'information, tels qu'Internet font qu'un film doit dépenser de plus en plus d'argent pour exister médiatiquement. Ces dépenses sont à la charge du distributeur.

Par contraste, les mécanismes actuels de financement, tout au moins en France, font en sorte que la production est à priori une activité non risquée,... si le producteur parvient effectivement à réunir les fonds, ce qui en général est le préalable à tout clap de début de tournage. 
Lorsque l'on dit que le cinéma se porte bien, on parle en fait plutôt de la fréquentation des salles de cinéma. Même pour ce créneau, la réussite concerne avant tout les multiplêxes. Les salles de cinéma d'art et d'essai tirent la langue, et sans les subventions du CNC, seraient bien en peine d'afficher des résultats positifs.

En fait, le cinéma est de plus en plus tiré par quelques "locomotives", qui à quelques exceptions près sont trustées par les filiales distribution des grands groupes. 
La démocratisation du métier de distributeur a fait en sorte que des sociétés de production ne trouvant pas de distributeur acceptant de payer un M.G. intéressant, où même de racheter leur film, se sont lancées elles-même dans l'aventure de la distribution. 
Il y a donc au final beaucoup d'appelés, très peu d'élus, et surtout le système continue de fonctionner selon un schéma qui fait reposer une bonne partie du risque de sortie du film sur les épaules du distributeur. 

Selon moi, le système apparait vraiment à risque de se marginaliser entre très gros distributeurs (ou gestionnaires de droits) qui vivent avec un catalogue énorme. Et petits distributeurs qui luttent pour leur survie, et ne tiennent que grâce aux subventions du CNC.

Et ayant dit cela, il faut encore prendre en considération trois faits majeurs qui noircissent encore davantage le tableau : 

  1. La démocratisation du téléchargement par Internet et des technologies de "home cinema". Beaucoup de jeunes ne vont pas au cinéma ou pas souvent, simplement parce qu'ils n'ont pas le temps matériel de voir et de faire tout ce qu'ils voudraient.
  2. La crise économique qui fait que les gens ... continueront d'aller au cinéma, mais de plus en plus selon une logique principalement marchande (pour voir les blockbusters), et qui fait surtout qu'un film peut-être très vite détruit par une certaine critique, sans lui laisser le temps de trouver son public.
  3. Cette même crise économique est déjà responsable d'une ponction des recettes du CNC par le gouvernement. Contrairement à ce que m'affirmaient des experts auto-proclamés du secteur cinématographique, il est clair que l'état ne se gênera pas pour taper dans les réserves du CNC, au motif de " l'intérêt supérieur de l'état" et des "nécessités économiques en cours".
Il résulte de tout cela, qu'effectivement le secteur de la distribution est un secteur en pleine ébullition avec une redistribution accélérée des cartes. 
Mais ce n'est absolument pas un secteur où les places seront faciles à prendre : chaque intervenant doit gérer des risques énormes sur un marché de plus en plus difficile et qui reste une industrie de prototypes.
Les conditions de vie, et même de survie sont tellement difficiles en fait, que ceux qui tiennent passent une partie non négligeable de leur temps à cultiver leur réseau. 
Soyons honnêtes : les réseaux existent dans tout secteur d'activité. Certes, mais c'est quand même la première fois que je vois un secteur d'activité dans lequel le copinage est si important pour réussir. Plus même que la compétence. Et en même temps, s'agissant d'un secteur en perpétuel manque d'argent, et sous perfusion permanente des pouvoirs publics. ce n'est pas étonnant.
What did I expect ? 
























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